Interview
Jean-Philippe
Delmas
Chef d'exploitation
Château Haut Brion
Haut-Brion
fut le premier château de la région à
travailler le vin avec des cuves en inox. Sous la direction
de votre père, le Château était réputé
pour son innovation. Aujourd'hui comment se traduit l'innovation
? Avez-vous des exemples concrets qu'on peut divulguer?
Nous
essayons des choses. On en parlera quand on sera sûr. Le défaut
du vin aujourd'hui, c'est qu'on veut toujours aller vite,
et encore plus vite. Nous préférons
être prudent quand on modifie quelque chose. On l'essaye
sur une petite partie, on voit comment ça évolue
en vieillissant. Et éventuellement on traite ensuite
l'ensemble de la récolte. Oui nous continuons à
innover aujourd'hui, et toujours de manière raisonnée.
Le Château a planté des plants de Malbec, Sangiovese
et même Pinot Noir. Que sont devenus ces plants ? Y-a-t'il
eu une exploitation et une commercialisation de vin à partir
de ces cépages?
Non,
il n'y a jamais eu d'exploitation commerciale de ces cépages.
Notre démarche était de savoir comment se comporteraient
des cépages un peu exotique à
Bordeaux.
D'autre part, nous maintenons une collection ampelographique
de clones de cépages. Nous les gardons à la demande
de la Chambre d'Agriculture. L'Etat français a réparti
géographiquement les souches afin de réduire
le risque. Nous conservons des plants
à Haut-Brion au cas où un jour on aurait besoin
de souches mères ailleurs en France. Une petite surface
est mise à disposition afin de garder la mémoire.
Pouvez vous nous donner des détails sur
la vinification à Haut-Brion?
On
n'a pas de recette particulière à Haut-Brion
qui soit vraiment une technique qu'on ne ferait pas ailleurs.
Sur la partie vinification, c'est plus de la philosophie.
Nous aimons travailler en extraction relativement douce afin
d'extraire les meilleures choses. Nous essayons d'éviter tout choc
thermique, toute intervention par des moyens mécaniques,
afin de garder la spécificité de Haut-Brion.
J'aime bien prendre l'exemple de la macération du thé.
Le défi est d'extraire suffisamment sans excès,
dans un but uniquement gustatif. C'est comme pour le thé,
si on infuse les pellicules du raisin pendant une heure, on
obtient du rosé. Vous le trouverez bien léger
pour du vin rouge. Si on le laisse plus longtemps comme le
thé on obtient quelque chose de plus noir, de plus astringent.
Il s'agit de trouver le temps d'infusion idéal. Ce n'est
pas facile. On y consacre beaucoup de temps. Le temps d'infusion
idéal est marqué sur le sachet de thé,
contrairement au vin. Les durées peuvent être
de 15, 20 ou 30 jours. Elles changent chaque année.
Combien de temps doit-on conserver un Haut-Brion
d'un millésime récent. A partir de quand
conseillez vous de le déguster?
Il
faut distinguer selon le type de millésime.
Pour un millésime difficile: le vin est accessible plus
tôt. Par exemple, le 1997 est très plaisant aujourd'hui.
Le vin est bon après 5 années. Je déconseillerai
de le garder plus longtemps, il ne gagne presque rien.
Pour les beaux millésimes: je conseillerais d'attendre
10 ans. Ils peuvent gagner un petit peu à attendre.
Pour les millésimes exceptionnels: ils sont rares, d'une
maturité presque parfaite. Ils sont bons dès
leur naissance. Je pense à 2000, 1990, 1982, 1961, 1959.
Ils sont toujours bons. Par exemple, hier je dégustais
un 1982, je vous rassure je n'en bois pas tous les jours. Avec
ce vin on a toujours l'impression d'être à
l'optimum. Ca fait 10 ans qu'il est comme ça et ça
fait 10 ans qu'il est à son optimum. Vous pouvez le
garder aussi longtemps que vous le voulez.
Suite
de l'interview avec Jean Philippe Delmas, Chateau Haut-Brion
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Chateau Haut-Brion
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